Virée aérienne près du périph [Jeudi, fin de journée]

Les derniers rayons du soleil couchant ne laissaient voir des hautes tours dans lesquels des centaines de familles étaient entassées les unes sur les autres, que des silhouettes sombres qui se découpaient sur un ciel orangé.

Soudain, une forme bondit par-dessus les bâtiments. Pirouette tournait sur lui-même, fendant les airs pour agripper une poutre de métal qui dépassait d'un des édifices délabrés. L'élan lui permit de se balancer et de repartir de plus bel. Quelques poussées des pieds le firent rebondir entre deux façades d'immeubles comme une balle de flipper. Enfin, il ralentit ses acrobaties pour se poser en dérapage sur un toit.

Ses virées en costume étaient pratiquement sa raison de vivre. La première fois qu'il avait pu voir le monde de plus haut, il avait ressentie cette ivresse qui ne le quittait plus depuis. C'était sa drogue, sa musique, c'était ce qu'il aimait faire pour se vider la tête.

Et ces derniers temps, il en avait besoin. Ce sentiment amère d'avoir du sang sur les mains ne l'avait pas quitté depuis ce jour à la banque. Il avait joué avec le feu, se croyant à l'abri des balles. Il l'était mais, pas les otages. Des gens étaient morts. Il avait vus les cadavres, les visages des familles éplorées aux infos. Il se sentait stupide, inutile, responsable. Et ce n'était pas juste une culpabilité saine comme la honte du survivant ou une connerie dans ce genre. Non. Quiconque avait assisté à la scène savait qu'il était directement responsable.

L'Ecolière lui en avait donné l'ultime confirmation. Ce n'était pas tant quand elle l'avait engueulé, ni ses grandes phrases agaçantes toutes faites. Non, c'était le fait qu'elle aie prit sur elle devant les forces de l'ordre la faute qui revenait à Damien. C'était là que le garçon avait perdu une partie des préjugés qu'il avait sur elle et qu'il avait réalisé l'étendue de son erreur.

Dépité, le garçon s'assit sur le rebord du toit. Il avait une vue imprenable sur le périphérique qui traversait le quartier, comme un canyon de béton dans lequel des voitures circulaient sans cesse dans un concert de bruits de moteur, de klaxons et de fumée. Damien baissa la tête et ferma les yeux, écoutant simplement le son de la ville, tentant de chasser sa culpabilité.